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Le juge peut-il se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire ?

Civil - Procédure civile et voies d'exécution
05/06/2020
Hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, peu important qu’elle l’ait été en présence de celles-ci. Tel est le principe posé par la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 14 mai 2020.
Un client refuse de régler le solde du marché de réfection d’un escalier extérieur qu’il avait confié à l’entreprise. L’assureur de celle-ci diligente une expertise concluant à l’absence de malfaçon. Une expertise qui se déroule en présence des deux parties. 

Ce même client décide de faire réaliser une nouvelle expertise, à laquelle l'entreprise et son assureur sont convoqués. Conclusion : des travaux de reprise sont nécessaires. Il forme opposition à une ordonnance qui lui enjoint de payer 810 50 euros au titre du solde du marché en sollicitant réparation des désordres.  

Les juges condamnent l’entreprise à verser une somme d’argent au client au titre des malfaçons. Contestant cette condamnation, elle soutient « que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, et ce peu important qu’elle l’ait été en présence des parties ; qu’en fondant exclusivement sa décision sur le rapport de M. Z... réalisé à la demande des époux X..., le tribunal d’instance a violé les articles 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme ».

La Cour de cassation infirme la position des juges du fond au visa de l’article 16 du Code de procédure civile. Un texte qui prévoit que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. La Haute juridiction indique qu’il en résulte que « hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, peu important qu’elle l’ait été en présence de celles-ci ».

Ainsi, en se fondant sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties par un technicien de son choix, la cour d’appel a violé l’article 16 du Code de procédure civile.
 
Source : Actualités du droit