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Responsabilité du commissaire aux apports en cas d'apport de parts sociales par un époux commun en biens

Civil - Personnes et famille/patrimoine
19/10/2016
L'existence d'une faute susceptible d'être imputée au commissaire aux apports doit être appréciée au regard du contenu de sa mission qui consiste, en application de l'article L. 223-9 du Code de commerce, à apprécier la valeur des apports, en s'assurant que celle-ci n'est pas surévaluée et qu'elle correspond au moins à la valeur nominale des actions ou parts, et, le cas échéant, les avantages particuliers qui peuvent être stipulés lors de ces opérations. Dans le cadre de cette mission, il lui appartient de s'assurer de l'existence et de la nature des apports et de vérifier que l'apporteur est bien titulaire des droits lui permettant d'effectuer les apports envisagés. Lorsque les biens sont apportés par une personne physique, le guide professionnel édité par la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) préconise de vérifier la disponibilité de l'apport en fonction de son régime matrimonial et indique que "s'il s'agit d'un bien commun, il convient de rappeler que le conjoint doit intervenir à l'acte sous peine d'un risque de nullité". Et, une faute commise à l'occasion de ces opérations, destinées à protéger la personne morale qui reçoit les apports ainsi que ses associés d'une surévaluation des apports ou d'un apport indisponible, est susceptible d'ouvrir droit à réparation au bénéfice d'un tiers, si ce dernier démontre que cette faute lui a occasionné un préjudice. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de Riom le 21 septembre 2016.

En l'espèce, peu de temps avant leur divorce, un mari a, sans en avertir son épouse, fait apport de parts sociales de SARL, créée au cours du mariage, à une EURL. Un commissaire aux apports ayant évalué lesdites parts, l'ex-épouse a assigné ce dernier en responsabilité pour avoir éludé ses droits d'épouse commune en biens. La cour la déboute de sa demande. En effet, s'il appartenait au commissaire aux apports de s'interroger sur la disponibilité des apports au regard de la situation matrimoniale de l'apporteur, l'examen des statuts de la SARL montre que l'épouse avait déclaré avoir été informée de l'apport et qu'elle avait indiqué renoncer à devenir associée au sein de cette personne morale. Dès lors, le souscripteur des parts acquises pendant le mariage, avait seul la qualité d'associé et les parts, qui n'étaient entrées en communauté que pour leur valeur patrimoniale, ne pouvaient que lui être attribuées. La qualité d'associé attachée à des parts sociales dépendant de celle-ci ne tombe pas dans l'indivision post-communautaire qui n'en recueille que la valeur, de sorte que le conjoint associé peut transmettre son titre sans recueillir l'accord de ses co-indivisaires. Dès lors, l'épouse ne démontre, ni que les parts de la SARL n'étaient pas disponibles, ni que leur cession lui a occasionné un dommage, puisque leur valeur a été recueillie par l'indivision post-communautaire.
Source : Actualités du droit